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Nos stagiaires découvrent des strates d'histoire

Nos ateliers accueillent régulièrement des stagiaires. Ce fut une rare opportunité pour Julie Quénet, étudiante en dernière année de master, de pouvoir travailler sur un projet complet en équipe. Elle nous partage son expérience à propos de la restauration d’un triptyque de Michel Coxcie, provenant de l’église Notre-Dame au Sablon à Bruxelles.

Nos ateliers accueillent régulièrement des stagiaires. Julie Quénet, en dernière année de master à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, a participé pendant trois mois à l’étude et à la restauration d’un triptyque de Michel Coxcie, provenant de l’église Notre-Dame au Sablon à Bruxelles. Le projet est supervisé par Nathalie Laquiere.

“C’était un stage très enrichissant, tant professionnellement qu'humainement parlant. On travaillait toujours sous le regard attentif de Nathalie et des collègues qui étaient toujours là pour nous aiguiller, proposer des suggestions et explications lorsque c’était nécessaire.” Ce fut, pour Julie, une rare opportunité de pouvoir travailler sur un projet complet en équipe, en suivant les retouches presque du début jusqu'à la fin.

Les donateurs Charles Quarré et sa première épouse et leurs enfants qui figurent sur les volets donnent un intérêt historique au triptyque. Il fut un collaborateur assidu du Duc d’Albe qui réprima cruellement la révolte lors des troubles religieux au XVIe en faisant exécuter par pendaison plusieurs opposants, pas loin de l'église…

La restauration et l’étude, entièrement couvertes par un subside de la Région de Bruxelles-Capitale et un don du Fonds Baillet-Latour, ont nécessité un nettoyage et des comblements préalablement aux retouches qui furent réalisées en trois étapes. “C’est quelque chose d'un peu différent de ce que j'ai l'habitude de faire”, raconte Julie. “D’abord avec de l'aquarelle, ensuite avec une résine synthétique du Paraloid B-72 et enfin avec les Gamblin colours. L’objectif est de monter la retouche progressivement, de façon à avoir quelque chose de très progressif et de réversible.” Julie a pu participer aux trois étapes, ce qui fut très enrichissant.




Dans le cadre de son mémoire de master, Julie s’intéresse aux remaniements en peinture murale, quand plusieurs strates décoratives ont été superposées dans le temps sur une même paroi. “Dans mon école, on est formé à la fois à la peinture de chevalet et à la peinture murale. Les deux me semblent très complémentaires, même si l'approche peut être différente.”

Les paramètres pris en compte dans la prise de décision lorsque différentes strates peuvent être à dégager ne sont pas si éloignés de ce qu'on retrouve en peinture de chevalet, puisqu’on est souvent confrontés à des repeints, des remaniements dans le temps. “La question du retrait ou non de ces strates postérieures peut se poser car elles font aussi partie de l'histoire matérielle des œuvres. Parfois, on peut se retrouver face à des parois qui présentent une multiplicité de fragments de différentes époques qui se côtoient, qui sont plus ou moins entremêlés, plus ou moins superposés”, explique-t-elle. Dans certains cas, il n'est pas possible de dégager une strate sans endommager ce qui se trouve en dessous, particulièrement en peinture murale où la strate sous-jacente est parfois retravaillée, voire piquetée, pour que le nouvel enduit puisse adhérer correctement.


“Dans le triptyque de Coxcie, certains repeints anciens n’ont pu être dégagés parce que les matières sont difficilement solubles. Ils nécessiteraient des solvants avec une forte action qui risqueraient d’endommager la couche picturale originale. Nous travaillons toujours avec prudence de manière progressive.”

Julie Quénet

En peinture murale, ces questions peuvent être particulièrement épineuses et il est parfois difficile de mettre de l’ordre afin d’obtenir une cohérence entre différents fragments hétérogènes, tout en respectant les fragments originaux en place.

Pour Julie, “la médiation joue un rôle essentiel pour rendre compréhensible l'intervention de conservation-restauration. On a toujours pour but de permettre aux publics et aux générations futures de mieux apprécier ces décors, de leur donner une meilleure lisibilité. Des panneaux explicatifs plus ou moins détaillés, voire d’éventuels dispositifs de réalité augmentée, permettent d’expliquer les choix qui ont été faits et de montrer des strates occultées qui ne sont plus visibles."

Lors de la prise de décision du parti pris d’intervention, le choix dépend également des valeurs qu'on choisit de privilégier, puisque si la valeur historique a une importance évidente dans la réflexion, les valeurs esthétiques, culturelles, voire cultuelles entre autres ; qui peuvent être associées aux biens culturels ; s’invitent également dans la réflexion et il est important de les identifier pour les prendre en compte au mieux dans le traitement conservation-restauration.”

En principe, notre restauration peut durer 100 ans. "Tout dépend des conditions climatiques dans lesquelles le tableau sera conservé.” En effet, les conditions dans lesquelles l'œuvre va se trouver dans les décennies à venir influenceront l’état de conservation.

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